LeDouble, l’anatomiste confirmé ; l’Ecole des Variations

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Après cette interruption forcée, il repart de plus belle. Eugène Giraudet venait de décéder (fin 1887). Il est nommé en 1888 professeur titulaire d’Anatomie à l’Ecole de Médecine de Tours et fait le discours de rentrée le 1er décembre sur « La Médecine et la chirurgie dans les temps préhistoriques ». C’est aussi la période (1890-1891) où il commence à publier ses travaux d’anatomie à l’Académie de Médecine.

En 1897, il publie un volumineux (864 pages…)  »Traité des variations du système musculaire de l’homme et de leur signification au point de vue de l’anthropologie zoologique », préfacé par le Pr. Marey http://web2.bium.univ-paris5.fr/livanc/?cote=141143×01&p=4&do=page. Quel lien y a-t-il entre LeDouble et Marey pour qu’il accède ainsi à sa demande, alors qu’il n’est pas anatomiste ?

Marey s’en explique un peu dans la préface (anatomie fonctionnelle) http://web2.bium.univ-paris5.fr/livanc/?cote=141143×01&p=4&do=page, mais est-ce suffisant pour l’avoir motivé ? Quels autres liens ?? Alfred Richet ? Paul Broca ? A nouveau la Société d’Anthropologie de Paris ?

Depuis longtemps il s’intéressait aux variations de l’anatomie humaine (il dit lui-même avoir commencé en 1876, à Paris) http://web2.bium.univ-paris5.fr/livanc/?cote=141143×01&p=8&do=page, et il avait déjà publié en 1883 une revendication de priorité sur les anomalies musculaires chez l’homme dans le Bulletin de la Société d’Anthropologie de Paris. Il cite aussi dans ce Traité le nom de collègues étrangers qui l’ont aidé, ainsi que de collègues français http://web2.bium.univ-paris5.fr/livanc/?p=12&cote=141143×01&do=page : Marey, Deniker (bibliothécaire du Muséum), Mathias Duval, Farabeuf, Blanchard, Poirier, Pozzi, Sebileau, Laborde, Morestin, de la Faculté de Médecine, Dureau, bibliothécaire de l’Académie, Hervé, Manouvrier, Chudzinski et Regnault, de l’Ecole et de la Société d’Anthropologie de Paris, Heydenreich, Nicolas et Prenant, de Nancy, Wertheimer de Lille, Charpy de Toulouse, Paulet et Gilis de Montpellier, Maisonneuve et Motais d’Angers, Moussu, Lavocat et Lesbre, des Ecoles vétérinaires d’Alfort, de Toulouse et de Lyon, Cuyer, des Beaux-Arts. Pour les Tourangeaux, il remercie les prosecteurs, les aides d’anatomie et les élèves de l’Ecole de Médecine : Revol, Delaittre, Cuvier, Danseux, Maurice, H. Barnsby, André, J. Thomas, Bougrier, Compain, Bourgougnon, Girard, Petit, Robert, Sabathé, Dubois, Servant, Lelot, Boyer, Alain, Franchet, Audat, Ansaloni, Mahoudeau, Roux (sans doute Roux-Delimal), Sainton, George, Jusseaume, etc, etc. Toujours est-il que ce traité « définitif » ne passa pas inaperçu… Il fut couronné par l’Académie des Sciences (prix Montyon 1500 F et mention honorable), par l’Académie de Médecine (prix Chatauvillard, 400 F), par la Société anatomique de Paris (prix Godard 200 F) et la Société d’Anthropologie de Paris (prix Broca 1500 F). Dès lors, LeDouble s’imposa comme le spécialiste des variations, et l’école d’anatomie de Tours devint l’école des variations. En 1898, il devient membre correspondant de l’Académie de Médecine.

Le 11 juillet 1897, il prononce un discours à Brèches (au nom de l’Ecole de Médecine), à l’inauguration du monument Velpeau. A-t-il été choisi par l’Ecole de Médecine parce que c’est lui qui représentait le mieux l’ »école Velpeau » ? Elève d’Alfred Richet, lui-même élève de Velpeau, se revendiquait-il lui-même de cet héritage ? A voir…

Associé national de l’Académie de Médecine en 1907. Il est admis à la retraite à partir du 1er octobre 1909.

Il est membre du Comité de patronage de la Revue AEsculape, dans laquelle il écrit plusieurs articles.

Membre du Comité d’Honneur de la Touraine artistique, aux côtés du Dr Verneau, professeur d’Anthropologie au Muséum et directeur du musée ethnographique du Trocadéro (une connaissance proche ?). Cette revue se fait régulièrement l’écho de ses travaux (« l’infatigable travailleur ») et publications. En 1912 (n°1, p32), sont évoqués « Les Velus » comme une « étude technique et historique des plus curieuses », et sont rappelées les paroles de Raphaël Blanchard à propos des Traités des variations : « En aucun pays il n’a été élevé un pareil monument à l’anatomie ». En 1913 (n°5, p.139-140, avec photo), Louis Dubreuil-Chambardel publie un article à l’occasion de sa Légion d’Honneur http://www.culture.gouv.fr/Wave/savimage/leonore/LH127/PG/FRDAFAN83_OL1542045v001.htm, enfin obtenue (c’est David Barnsby qui la lui remettra). Celle-ci est fêtée en son absence lors du banquet de l’Union tourangelle à Paris en 1913 (Touraine artistique, n°8, p.275) : le Dr Sainton « regrette que son insistance, jointe à celle de M. le Ministre du Travail (René Besnard), n’ait pu vaincre son horreur bien connue pour les manifestations » ; il lira une lettre d’excuses d’A.F. Le Double. La Touraine artistique en « ajoute une couche » en précisant que « Les Sociétés savantes et artistiques de Tours ont eu également à regretter que l’éminent professeur Le Double ait décliné toutes manifestations à l’occasion de son entrée dans l’Ordre de la Légion d’Honneur : ses amis et ses élèves eussent été heureux d’offrir au maître un nouvel hommage qui eût rappelé la magnifique solennité de l’Hôtel de Ville, lors de sa nomination comme membre de l’Académie de Médecine » (Touraine artistique, n°8, p.275). Dans le n°10 de Touraine artistique, Jérôme Le Goff se livre à une analyse bibliographique du « Bossuet anatomiste » (1913, p.341-347).

Vice-Président de l’Association des Anatomistes (1901), Président d’honneur de la Société médicale d’Indre-et-Loire (1902), Membre du Comité et rapporteur dans les sections d’Anatomie descriptive et d’anatomie comparée des XIIIème et XIVème Congrès internationaux de Médecine de Paris et de Madrid (1900-1903), Délégué du Ministère de l’Instruction publique et des Beaux-Arts au XIVème Congrès international de Médecine de Madrid, Membre titulaire ou correspondant des Sociétés anatomique, d’anthropologie, des Etudes Rabelaisiennes de Paris, etc, etc. Voir s’il était membre de la Société Archéologique de Touraine. En tous cas, il était président d’honneur du comité local du VIème Congrès Préhistorique de 1910 (auquel il n’a pu assister parce que malade ; cf lettre de LDC).

Maître de Louis Dubreuil-Chambardel, Probablement membre de la Société d’Anthropologie de Paris et il était également lié à François Houssay, Max Bernardeau et Edmond Chaumier.

Voir une biographie très intéressante sur http://www.bium.univ-paris5.fr/histmed/medica/paleo.htm, par Pierre Thillaud, paléopathologiste, qui le considère comme un précurseur dans sa discipline.

Ses monumentaux ouvrages, traitant des variations anatomiques chez l’homme et de leur signification au point de vue de l’anthropologie zoologique (muscles, 2 vol, 1897 ; os du crâne 1903, os de la face 1906, colonne vertébrale 1912) sont en ligne sur le site de la BIUM http://web2.bium.univ-paris5.fr/livanc/?cote=141143×01&do=chapitre, http://web2.bium.univ-paris5.fr/livanc/?cote=141143×02&do=chapitre, http://web2.bium.univ-paris5.fr/livanc/?cote=23041&do=chapitre, http://web2.bium.univ-paris5.fr/livanc/?cote=23041&do=chapitre, http://web2.bium.univ-paris5.fr/livanc/?cote=25362&do=chapitre). Le premier volume qui date de 1897 été préfacé par Marey, ce qui suggère des relations via Alfred et/ou Charles Richet.

Le recueil de 4 thèses publiées entre 1906 et 1910, dont les deux dernières sont dédicacées à Louis Dubreuil-Chambardel et qui faisaient partie de sa bibliothèque, illustre assez bien ce qu’était « l’Ecole de Le Double ». On y trouve les thèses de :

– Maurice Bourgerette. « Les Os mentonniers », soutenue en 1908. Il était ancien prosecteur d’anatomie à l’Ecole de Médecine de Tours. Extrait de la thèse : « L’Ecole de Tours qui jadis avait connu la gloire avec Bretonneau, Trousseau, Velpeau semble aujourd’hui avec les travaux de Le Double et de ses élèves vouloir se faire encore une personnalité. Les maîtres d’autrefois en avaient fait l’Ecole de la Clinique. Maintenant, certains l’appellent l’Ecole de l’Anatomie, d’aucuns même l’Ecole des Variations »

– P.E. Mérab. « Variations anatomiques et prédisposition morbide (La loi de Ledouble) », soutenue en 1906. Ce médecin, originaire de Constantinople, a fait ses études à Montpellier et a soutenu sa thèse à Paris. Il n’est donc pas un élève direct de LeDouble, et c’est ce qui fait tout l’intérêt de la thèse dont voici les premières lignes :

« La loi de Ledouble, qui est en pathologie ce que la loi de la sélection naturelle, énoncée par Darwin, est en biologie, et que toutes nos observations tendent à confirmer, énonce, telle qu’elle est exprimée plus loin, les trois vérités suivantes :
1° Il y a des variations dans la constitution anatomique de l’homme comme des animaux, variations de conformation, variations de situation ou de rapports ;
2° Il y a un type d’architecture anatomique qu’on pourrait appeler normal, ou qui du moins est le plus répandu, que nous considérons comme le plus parfait, comme celui auquel est arrivée la nature après de multiples tâtonnements, le plus parfait parce que c’est celui qui répond le mieux aux fonctions, non seulement physiologiques, mais aussi psychiques et sociales de l’homme ; le plus parfait aussi, parce que c’est celui qui a le mieux résisté aux causes de destruction, autrement dit aux maladies y compris les traumatismes, à l’épreuve desquelles a été soumis notre espèce dans la succession des générations ;
3° Ces variations qui gravitent, pour ainsi dire, autour du type commun, peuvent être considérées soit comme des restes, des souvenirs d’un type déchu, soit comme des tentatives de la nature vers une forme plus appropriée aux nouvelles conditions d’existence ; ce sont, en somme, ou des désavantages ou des avantages dans la lutte pour la vie ; ce sont des anomalies récessives ou progressives. La loi de Ledouble ne s’occupe que des premières, et énonce que ces organes arrêtés dans leur développement, sont plus sujets que d’autres aux dégénérescences cancéreuses, scléreuses, graisseuses, aux affections inflammatoires, entre autres aux localisations tuberculeuses, aux atteintes toxi-infectieuses et auto-toxiques ; qu’ils sont enfin une cause de gêne ou même de maladie pour les organes voisins.
Cette infériorité de résistance fait que l’individu porteur de ces anomalies s’élimine pour ainsi dire de lui-même de la société de ses semblables, et  »les maladies sont ainsi un des agents de la sélection naturelle ». »

– Max Bernardeau. « L’os acromial (Anatomie humaine, anatomie comparée, pathologie, embryologie) ». Ancien élève de l’Ecole de Médecine de Tours et élève du Service de Santé de la Marine. Thèse soutenue à Bordeaux en 1907. Le Pr. Le Double est l’inspirateur et le directeur de cette thèse.

– Robert Lebas. Etude critique des stigmates anatomiques de la criminalité et de quelques théories criminalistes actuelles. Thèse soutenue à Paris en 1910. R. Lebas était ancien prosecteur d’anatomie de l’Ecole de Médecine de Tours. Voici des extraits de l’introduction :

« Nous sommes à une époque où les statistiques accusent un accroissement considérable des délits et des crimes et plus que jamais on recherche les causes de la criminalité. Le but de notre travail est de rechercher s’il existe un rapport de cause à effet entre la constitution anatomique anormale d’un induvidu et les tendances au délit et au crime. Autrement dit, y a-t-il, comme le prétend Lombroso, des individus qui apportent en naissant certaines anomalies anatomiques, appelées encore  »stigmates anatomiques de la criminalité », en même temps que d’incorrgibles tendances au crime ? Y a-t-il un type de criminel-né ? […]. Nous devons une grande part de cette discussion anatomique aux précieuses notes que nous a fournies M. le professeur Le Double, que nous avons eu l’honneur d’assister comme prosecteur, et qui d’ailleurs nous a inspiré le sujet de cette thèse. »

Il semble bien en effet que les travaux de Le Double sur les variations l’aient amené à combattre les théories de Cesare Lombroso. Sa leçon donnée le 12 novembre 1906 à l’Ecole de Médecine de Tours en témoigne. Elle s’intitule : « Les criminels. Les stigmates anatomiques de la criminalité et les théories criminalistes actuelles ». Cette leçon a d’ailleurs été recueillie et rédigée par Robert Lebas. En voici les dernières lignes :

« Les théories de Lombroso sur les criminels ont créé dans le public des préjugés qui leur survivront. Une tendance à ne plus voir que des irresponsables devant la loi s’est facilement accréditée auprès des âmes généreuses. Il faut bien convenir, évidemment, messieurs, que la mauvaise éducation, certaines dégénérescences héréditaires, l’alcoolisme, la misère, viennent singulièrement atténuer la responsabilité de l’individu. Mais le criminel-né, celui qu’on pourrait reconnaître à certains stigmates physiques, n’existe pas. Que le malfaiteur ait le nez de travers, les oreilles mal ourlées ou en anse ; qu’il ait une fossette vermienne, la mâchoire massive, les zygomes écartés, les saillies sourcilières surplombantes et le front fuyant, les orbites très grandes et très distantes ; qu’il soit asymétrique de la tête ou du visage ; qu’il ait l’œil hagard, faux, sinistre, les lèvres minces et la barbe rare, un lobe frontal à quatre étages, une confluence des scissures cérébrales ; que, plus que tout autre, il ait des formes suspectes, des particularités exceptionnelles, des défectuosité attribuables, sans doute, à un trouble de développement du cerveau ou du squelette céphalique, des traits pathologiques ou tératologiques, il n’est pas moins acquis, après les recherches que je poursuis depuis plus d’un quart de siècle sur les variations et les anomalies anatomiques humaines et animales, qu’il est impossible d’établir une relation de cause à effet entre une variation ou une anomalie cérébrale ou crânio-faciale quelconque et la criminalité.

L’étude anatomique d’un individu, si je m’en tiens aux cinq volumes que j’ai déjà publiés sur les variations et les anomalies anatomiques humaines et animales, et qui sont devenus classiques dans le monde entier et ont été couronnées par l’Institut (Académie des Sciences), l’Académie de médecine, la Faculté de médecine de Paris, la Société anatomique, la Société d’Anthropologie et la Société de Biologie de Paris, l’étude anatomique d’un individu, dis-je, est encore impuissante à décider s’il a été, s’il est ou sera un scélérat.

Ma manière de voir à ce propos a été, du reste, Messieurs, partagée par le professeur Marey, membre de l’Institut, le préfacier de mon Traité des variations du système vasculaire chez l’homme ; le professeur Sanson, le l’Institut agronomique ; Clémence Royer, l’illustre savante française, et est partagée à l’heure présente par le professeur Lacassagne, de l’Université de Lyon ; le professeur Manouvrier, de l’Ecole d’Anthropologie de Paris ; le professeur Th. Dwight, de l’Université de Harvard (Amérique), etc… Tout récemment, un jeune avocat tourangeau, Me Sabourin, a soutenu, dans sa thèse de doctorat en droit, et en me faisant l’honneur de citer mes travaux, que les théories lombrosiennes du crime sont inadmissibles. Il y a un an, un de mes élèves ; Louis Dubreuil-Chambardel, a également, dans sa thèse de doctorat en médecine, couronnée par la Faculté de médecine de Paris, attaqué ces théories.

Récemment, elles ont été prises encore à partie par deux anciens élèves de l’Ecole de médecine de Tours, dans la thèse de doctorat en médecine de Delaboudinière, mon ancien prosecteur ; dans celle de Duval, soutenues toutes deux devant la Faculté de médecine de Bordeaux, et dans celle de Mérab (de Constantinople), soutenue devant la Faculté de médecine de Paris et qui, toutes, ont obtenu la mention très bien. Au cours de cette année, elles le seront bientôt aussi dans les thèses de doctorat en médecine que doivent soutenir devant la Faculté de médecine de Bordeaux, Max Bernardeau, élève du service de santé de la marine, R. Héron, de Tours, le neveu de mon vieil ami le Dr. E. Héron, le si dévoué et si sympathique président de la Section tourangelle de la Ligue de l’Enseignement, et devant la faculté de médecine de Paris, mon ancien prosecteur M. Bourgerette.

On ne naît pas criminel, je me plais à le répéter après Lacassagne, Tarde, etc., on le devient. Le criminel est un microbe qui, pour pulluler et devenir virulent, a besoin d’un bouillon de culture approprié. Et voila pourquoi, messieurs, les sociétés n’ont que les criminels qu’elles méritent. Cette théorie de la criminalité a, sur celle de Lombroso, un immense avantage. Si le crime est le résultat d’une influence ancestrale, il n’y a rien à faire pour le prévenir, mais s’il est la conséquence d’une éducation vicieuse, des mauvais exemples, de la vie en commun dans les grandes agglomérations, de l’amour des plaisirs, de la richesse et du luxe, le résultat de la paresse, les législateurs peuvent restreindre la criminalité par des institutions charitables et des lois prévoyantes.

Quoiqu’on en dise, en effet, Messieurs, les institutions charitables et surtout les bonnes lois, quand elles sont bien appliquées, servent à quelque chose. Je vous en donne immédiatement la preuve. Vous connaissez la loi Roussel qui, en France, fournit de si brillants résultats en ce qui touche la protection de l’enfance. Il y a cinquante ans, les Scandinaves étaient les plus effroyables buveurs d’eau-de-vie qu’il y eût en Europe. Dans la Suède seule, il n’y avait pas moins de 173.124 distilleries, soit un alambic pour 17 habitants ! Le mal ne fit que s’aggraver, en dépit des efforts des sociétés de tempérance organisées dans le pays dès 1819. Une loi contre l’alcoolisme était évidemment nécessaire ; elle fut proposée par Pierre Wieselgren, doyen de Cotembourg. Le roi Oscar 1er s’y intéressa passionnément, et parvint à la faire voter le 18 janvier 1855. C’est cette loi qui est généralement connue sous le nom de « système de Cotembourg ». Elle a produit de très beaux résultats en Suéde, mais c’est en Norwège où elle fut rapidement adoptée et perfectionnée, qu’elle a obtenu le plus magnifique succès. La Norwège, qui naguère était un des pays les plus alcooliques de la terre, est aujourd’hui un de ceux où l’on boit le moins d’eau-de-vie. La Finlande a adopté des lois analogues avec le même bonheur. Le Danemark, au contraire, n’en a rien fait. C’est aujourd’hui le pays de l’Europe où la consommation de l’alcool est de beaucoup la plus élevée. Ces exemples montrent que le législateur est très loin d’être désarmé contre l’alcoolisme ; il ne l’est pas davantage contre la criminalité.

Cela vous prouve combien il faut, Messieurs, se défier des phrases toutes faites ! Que de gens admettent comme article de foi l’impuissance des lois, et répètent en français et en latin (car c’est beaucoup plus profond et plus convaincant lorsque c’est dit en latin) que les lois ne peuvent rien sans les mœurs ; ils le disent simplement parce que d’autres l’ont dit avant eux. Les lois, au contraire, Messieurs, peuvent souvent beaucoup : beaucoup de mal lorsqu’elles sont mal faites ou trop ambitieuses, mais aussi quelque bien lorsqu’elles sont sages et très étudiées. »

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