René Boureau et la sérothérapie

Boureau

Panneau, la sérothérapie

Fin 1893, du fait d’une épidémie de diphtérie à Tours, il se rend à Paris, se fait introduire auprès de l’Institut Pasteur par un « ami » (on aimerait savoir lequel…). Il est alors confié à Auguste Chaillou. Il semble également suivre des cours à l’Institut Pasteur, bien qu’il ne figure pas sur la liste officielle reconstituée des élèves du cours de microbiologie de l’Institut Pasteur [1].

 »Aussi quels soupirs de soulagement ! Quels espoirs apportait le sérum ! Son apparition coïncida avec l’apparition à Tours d’une nouvelle épidémie vers la fin de 1893. Je partis à Paris où un de mes amis m’ouvrit la porte de l’Institut Pasteur. Ce fut mes débuts de laboratoire. J’en garde un souvenir ému. Nous étions confiés aux mains du Dr. Chaillou qui vient d’être tué en organisant le service des inhumations sur le front d’Arras. Il était chargé de notre éducation ; nous faisant visiter les malades de l’hôpital de la rue de Sèvres, prélever des ensemencements, les cultiver, faire les diagnostics bactériologiques et nous initier aux difficultés du tubage. Notre éducation clinique marchait de pair avec l’instruction bactériologique, avec les leçons de Roux, de Metchnikof données toutes portes ouvertes, avec cette libéralité, cette absence de Toute pose qui font l’éloge de l’Institut Pasteur. »

C’est donc lui qui ramène le sérum anti-diphtérique à Tours, et permet l’introduction à Tours de la sérothérapie qui sera utilisée avec succès par Léon Bezard et son gendre Paul Grasset pour venir à bout de l’épidémie de diphtérie (BIUM 49250). A cette occasion, il observe que le sérum ne fait pas disparaître le bacille de Loeffler de la gorge des enfants et que, de retour chez eux, il existe un grand risque de dissémination de l’infection. Il instaure donc la règle de ne laisser repartir les enfants qu’une fois constatée la disparition complète du bacille. C’est probablement pour cette raison qu’en 1895, René Boureau devient chef de laboratoire de Clocheville,  »premier laboratoire à avoir mis en place le « monitoring » des traitements par anticorps… »

 »Cette épidémie me permit de constater, ainsi que Sevestre et Méry, la persistance du bacille diphtérique dans la gorge des enfants guéris pendant un temps plus ou moins long. Avec cette infection méconnue jusqu’alors, l’enfant sort, retourne à l’école et sème partout ses germes. Depuis cette date, nous ne donnions l’exeat à nos malades qu’alors qu’une culture nous assurait de l’intégrité de sa gorge au point de vue bacillaire. Ce contrôle bactériologique nous valut de Huchard (Journal des Praticiens, 9 février 1895) ces lignes aimables. »

« En 1895, le fonctionnement du service des diphtéritiques à l’asile de Clocheville de Tours et en particulier les mesures prises pour ne renvoyer les malades qu’après la désinfection complète de leur gorge sont un exemple d’une initiative en avance sur celle de la capitale ».

En 1894, il devient chirurgien-adjoint de l’Hospice général de Tours.
En 1895, immédiatement à la suite de Charles Richet et Jules Héricourt, René Boureau publie un « Essai de sérothérapie contre le cancer » (Gazette hebdomadaire de médecine et de chirurgie, 14 septembre 1895, n°440). Le sérum avait été préparé par lui-même et le Dr. Darde. Dans cette communication, il rapporte le traitement de 10 patients, 3 dans le service du Dr. Louis Thomas, 1 chez Triaire, 1 chez Menier (peut-être Meusnier ?), 1 chez Charlot, 1 chez Bretheau, et 3 autres non précisés.

Le 27 janvier 1895, il publie  » Diagnostic bactériologique des angines » dans le Journal des Practiciens. Il expose différents cas où une injection de sérum anti-diphtérique a été envisagé. Dans un des cas, une petite malade du Dr Grasset, le sérum est injecté, la guérison est observée au bout de 10 jours mais l’examen bactériologique révèle que le bacille de Loeffler est toujours présent dans la gorge. Il confirme donc la théorie de Roux: le sérum n’est pas bactéricide. Il présente également d’autres cas (des patients de Chaumier et de Bezard), où on suspecte une angine diphtérique, mais où l’absence de bacilles est révélé par l’examen microscopique. Il insiste donc pour un usage prudent du sérum dans les cas où le diagnostic de l’angine diphtérique n’est pas posé.

Dans le premier numéro de la Gazette Médicale du Centre en 1896, Boureau publie avec Edmond Chaumier un article s’intitulant  » Les microbes du vaccin ». Ils détaillent le contenu bactériologique du vaccin de l’époque. Lorsqu’on dissocie systématiquement un grand nombre d’ensemencements de vaccin, on remarque plusieurs classes de bactéries : certaines très variables et très rares, d’autres identifiées comme des bactéries de l’environnement qui sont inoffensives et banales et enfin des staphylocoques. Boureau et Chaumier s’interrogent sur le rôle de la présence de ces staphylocoques dans le contenu vaccinal. Ils sont présents constamment dans tout vaccin, ce sont des bactéries « fixes » du vaccin. Ils différencient différentes variétés de ces staphylocoques : les staphylocoques ordinaires ( staphylococcus aureus, citreus ou albus) et une deuxième classe : les cereus ( Cereus aureus, flavus ou albus). En étudiant les colonies que fournissent les vaccins frais, ils sont frappés par la proportion considérable de colonies de staphylococcus cereus albus(colonies en forme de goutte de paraffine),( Gram positif en grappes au microscope). Il serait la bactérie dominante d’un vaccin de bonne qualité. En effet, les vaccins qui ne contiendraient plus de cereus ne donneraient plus de pustules, ils seraient devenus inefficaces. Les cultures seraient alors un bon moyen de juger de la virulence d’un vaccin. Les auteurs rapportent ensuite les résultats de leur expérience : sur 5 génisses inoculées avec des cultures de vaccin et non du vaccin frais classique, 4 ont fourni des pustules de vaccin reconnu efficace sur l’enfant. Il est donc légitime d’attribuer un rôle au cereus dans l’apparition des pustules vaccinales aux points où il était inoculé. En revanche des inoculations de cultures de cereux pures, ne produisaient pas de pustules. D’où la conclusion des auteurs : La vaccin serait-elle le produit de l’association d’un organisme inconnu avec le cereus ?

En 1910, il publie de nouveau avec Chaumier sur la sérothérapie :  » Etudes expérimentales sur la vaccine et la vaccination; clinique et bactériologie » dans la Revue internationale de la vaccine. Dans ce travail, Chaumier était chargé de la partie « clinique » et Boureau de la partie  » bactériologique ».
Ce travail consiste en l’étude de l’atténuation du vaccin. Dès 1892, Chaumier à l’Institut vaccinal observe la première perte de virulence du vaccin: après le trop nombreux passages, le virus meurt.
Ils étudient tout d’abord la corrélation entre la taille de la pustule réactionnelle et du succès de la vaccination. A la question du pourquoi de l’atténuation du vaccin de génisse, les auteurs répondent qu’il y a une influence du moment, du milieu, de la semence, de l’animal, ainsi qu’une influence bactériologique sur la pulpe vaccinale. Sur l’influence de la semence, on peut dire que des vaccins venant d’instituts différents entrainent des résultats très différents ( les semences de plusieurs instituts sont testées : Le Mans, Lyon, Chalons, Chambon…et montrent tous des résultats différents).
Ce article reprend une grande partie du contenu des « Microbes du vaccin » publié 14 ans auparavant …
Pour obtenir une pulpe virulente, il est indispensable de vacciner la génisse avec une pulpe très virulente. Il est donc nécessaire d’essayer au préalable sur des enfants le vaccin lorsqu’on veut vacciner des génisses. Pour obtenir de la vaccine très virulente, il est mentionné le procédé de rétro-vaccination, où on vaccine les génisses avec du vaccin humain, très utilisé en Allemagne. Ils se demandent alors pourquoi alors ne pas faire de la rétro-vaccination d’une espèce animale à une autre. Ils vont alors testé le passage du vaccin sur l’âne et la lapin. Ils vaccinent des génisses avec du vaccin d’âne ou de lapin puis réalisent l’inoculation à l’enfant : Obtention de très bonnes pustules chez les enfants, surtout avec le vaccin qui est passé chez l’âne.  » Le vaccin se purifie et devient plus virulent en passant d’une espèce animale à une autre, surtout si cette espèce animale, comme l’âne, est très apte à cultiver le vaccin ». Calmette utilise déjà ce procédé à Lille, où il utilise lui des bufflons.
Le vaccin perd peu à peu ses microbes donc plus les colonies sont abondantes, plus le vaccin est récent.

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